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Evaluation mondiale des déchets marins et de la pollution plastique

La pollution plastique est un défi environnemental qui menace gravement la santé des écosystèmes, ainsi que la vie humaine elle-même.

Une étude récente menée par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) met en évidence l’ampleur alarmante de ce problème et souligne l’urgence de réduire considérablement notre utilisation du plastique.

Selon le rapport du PNUE publié en 2021, la quantité de plastique produite dans le monde a atteint des quantités astronomiques et continue d’augmenter de manière exponentielle. La majeure partie de ce plastique n’est pas correctement gérée, ce qui entraîne sa dispersion dans les écosystèmes naturels, en particulier dans les océans.

Les conséquences de cette pollution plastique sont désastreuses. Les animaux marins et terrestres confondent souvent les déchets plastiques avec de la nourriture, ce qui entraîne une ingestion accidentelle, des blessures et même la mort. De plus, les microplastiques, de petites particules de plastique issues de la dégradation des déchets plus importants, sont devenus omniprésents, polluant les sols, les cours d’eau et les chaînes alimentaires, avec des conséquences potentiellement néfastes pour la santé humaine.

L’étude du PNUE met en évidence la nécessité de repenser notre modèle de consommation et de production, en adoptant une approche circulaire et en favorisant la réutilisation, le recyclage et la réduction de la consommation.

Le rapport de l’UNEP

Il existe des rapports qui sont souvent compliqués pour le commun des mortels car à destination des scientifiques et décideurs. Au contraire, ce rapport se veut pédagogique, argumenté et reste accessible à tous. Disponible en plusieurs langues dont le français, le rapport de synthèse se révèle bien suffisant avec ses 44 pages (comparé au rapport disponible en anglais uniquement et ses 148 pages).

De la pollution à la solution : une évaluation mondiale des déchets marins et de la pollution plastique

Il existe aussi une version interactive qui permet de se faire une bonne idée du problème et des chiffres en question en quelques clics:

La version interactive en ligne

Parcourir ces documents permet de mieux appréhender le problème et comprendre à quel point nous avons déconné depuis l’avènement du pétrole car, rappelons-le, les plastiques ce sont avant tout des énergies fossiles!

Des constats alarmants

Sans mesures efficaces et rapidement mises en place, il est prévu que le volume des déchets marins et de la pollution plastique continue d’augmenter rapidement. En fait, les projections indiquent que les rejets de déchets plastiques dans les écosystèmes aquatiques pourraient presque tripler d’ici 2040. Cette tendance alarmante souligne la nécessité urgente de prendre des mesures concrètes pour réduire la pollution plastique et préserver la santé des écosystèmes marins.

Selon les estimations, il y aurait actuellement entre 75 et 199 millions de tonnes de plastique dans les océans. Les quantités de déchets plastiques pénétrant dans les écosystèmes aquatiques pourraient passer d’environ 9 à 14 millions de tonnes par an en 2016 à entre 23 et 37 millions de tonnes par an en 2040, selon certaines prévisions. D’autres estimations indiquent une augmentation d’environ 19 à 23 millions de tonnes par an en 2016, atteignant environ 53 millions de tonnes par an en 2030.

Des conséquences multiples

Les déchets plastiques et autres dans le milieu marin représentent un grave péril pour l’ensemble de la vie marine et perturbent également le climat. Les plastiques constituent la fraction la plus importante, la plus nocive et la plus persistante des déchets présents dans les espaces marins, représentant au moins 85 % de leur total. Ils ont des conséquences létales et sublétales pour les baleines, les phoques, les tortues, les oiseaux, les poissons et les invertébrés tels que les bivalves, le plancton, les vers et les coraux. Parmi ces conséquences, on trouve l’enchevêtrement, la privation de nourriture, la noyade, la lacération de tissus internes, l’étouffement, la privation d’oxygène et de lumière, le stress physiologique et les dommages toxicologiques.

Les déchets plastiques ont des répercussions sur les écosystèmes marins, d’eau douce et terrestres, et peuvent modifier le cycle global du carbone en perturbant le plancton et la production primaire. Les écosystèmes marins, tels que les mangroves, les herbiers marins, les coraux et les marais salants, jouent un rôle crucial dans la séquestration du carbone, mais leur détérioration rend cette compensation des changements climatiques de plus en plus difficile.

Lorsque les plastiques se décomposent dans l’environnement marin, ils libèrent des microplastiques, des microfibres synthétiques et cellulosiques, des substances chimiques toxiques, des métaux et des micropolluants qui se retrouvent dans l’eau, les sédiments et les chaînes alimentaires marines. Les microplastiques peuvent véhiculer des organismes pathogènes nuisibles pour les humains, les poissons et les stocks aquacoles. Leur ingestion peut avoir des effets néfastes tels que des modifications de l’expression génétique et des protéines, des inflammations, des perturbations du comportement alimentaire, un ralentissement de la croissance, des altérations du développement cérébral, une diminution de la filtration et du rythme respiratoire. Ils peuvent également compromettre la reproduction, la survie et les capacités des espèces marines clés et des « ingénieurs écologiques » à former des récifs ou des sédiments bio-turbés.

La pollution plastique menace la santé et le bien-être humains. Le brûlage de déchets plastiques à l’air libre, l’ingestion de fruits de mer contaminés par des plastiques, l’exposition à des bactéries pathogènes transportées par des plastiques et la libération de substances chimiques préoccupantes dans les eaux côtières sont autant de risques pour la santé humaine. Les microplastiques peuvent pénétrer dans le corps humain par inhalation et absorption cutanée, s’accumulant dans les organes, y compris le placenta. L’absorption de microplastiques à travers les produits de la mer constitue une menace sérieuse pour la santé humaine.

Les effets sur la santé humaine de l’exposition aux substances chimiques présentes dans les déchets plastiques marins ne sont pas clairement établis, mais certaines de ces substances sont associées à de graves problèmes de santé, en particulier chez les femmes.

Les déchets plastiques marins ont un impact considérable sur la société et le bien-être humain. Ils dissuadent, dans certains endroits particulièrement exposés, les gens de se rendre sur les plages et les côtes, privant l’Homme des bienfaits des activités physiques et des interactions sociales, ainsi que des avantages pour la santé physique et mentale que ces endroits peuvent offrir. La menace pour les animaux marins emblématiques tels que les tortues de mer, les baleines, les dauphins et de nombreux oiseaux marins a des répercussions psychologiques importantes, car ces animaux revêtent une importance culturelle certaine pour certaines communautés. Les images répandues dans les médias traditionnels d’estomacs de baleines et d’oiseaux de mer remplis de fragments de plastique suscitent toujours de fortes émotions.

Un coût exorbitant

Ces déchets ont des coûts cachés pour l’économie mondiale. Ils ont un impact grave sur les moyens de subsistance des communautés côtières, ainsi que sur la navigation et les opérations portuaires. Les coûts économiques mondiaux de la pollution plastique marine, y compris les impacts sur le tourisme, la pêche, l’aquaculture et les coûts de nettoyage, ont été estimés entre 6 et 19 milliards de dollars en 2018. Selon les prévisions, d’ici 2040, les rejets accidentels de plastiques dans les océans pourraient représenter un risque financier annuel de 100 milliards de dollars pour les entreprises si les gouvernements leur imposaient de prendre en charge les coûts de gestion des déchets conformément aux volumes et à la recyclabilité prévus. En comparaison, le marché mondial du plastique en 2020 était estimé à environ 580 milliards de dollars. Presque 20% du marché à investir dans le recyclage, c’est énorme. Cependant, il n’est pas normal que ces entreprises ne prennent pas en charge ce coût financier. Sans parler des pertes en capital naturel marin qui se chiffre à 2 500 milliards de dollars par an.

Des dangers multiples

Les déchets plastiques et autres présents dans l’environnement marin sont des multiplicateurs de danger. Ils présentent de nombreux risques en cascade qui s’ajoutent à d’autres facteurs de stress tels que les changements climatiques et la surexploitation des ressources marines, entraînant des dommages bien plus importants que s’ils étaient considérés séparément. Les altérations de l’habitat causées par les déchets plastiques dans les écosystèmes côtiers essentiels nuisent à la production alimentaire locale et endommagent les infrastructures côtières, ce qui a des conséquences imprévisibles et de grande ampleur, notamment une diminution de la résilience des communautés côtières face aux phénomènes météorologiques extrêmes et aux changements climatiques. Il est donc nécessaire d’évaluer la menace associée à l’ensemble de ces risques cumulatifs.

 La présence de microplastiques dans les océans peut être due à différentes sources telles que la décomposition de plastiques plus grands, les décharges, les eaux usées, les particules en suspension dans l’air, les écoulements agricoles, les démolitions de navires ou les pertes accidentelles de cargaisons en mer. Les phénomènes extrêmes tels que les inondations, les tempêtes et les tsunamis peuvent également entraîner des déversements importants de débris dans les océans. Avec les prévisions indiquant que les quantités cumulées de plastiques produits depuis 1950 atteindront 34 milliards de tonnes d’ici 2050, il devient urgent de ralentir la production mondiale de plastique et de réduire les déchets plastiques qui se retrouvent dans l’environnement.

Les déchets plastiques dans les milieux marins se déplacent et s’accumulent sur plusieurs décennies, sous l’influence des marées, des courants, des vagues et des vents. Certains plastiques flottent, tandis que d’autres se retrouvent dans les eaux profondes, les deltas des fleuves et les mangroves. Il peut s’écouler beaucoup de temps entre le moment où les déchets sont rejetés sur terre et celui où ils atteignent les cours d’eau puis les océans et mers. Plus de la moitié des plastiques qui flottent en ce moment ont été produits avant les années 1990.

Il existe aujourd’hui un nombre croissant de points chauds où les déchets plastiques peuvent présenter à long terme des risques importants pour les écosystèmes et la santé humaine. Par exemple, la mer Méditerranée accumule d’énormes quantités de déchets plastiques en raison de son enclavement, mettant en danger des millions de personnes. L’océan Arctique est également vulnérable aux impacts sur son environnement naturel encore intact, ainsi qu’aux dommages causés aux populations autochtones et aux espèces emblématiques par l’ingestion de plastiques présents dans les chaînes alimentaires marines. La région de l’Asie de l’Est et du Sud-Est est également préoccupante en raison de la coexistence de volumes importants de déchets non contrôlés et de vastes populations dépendantes des océans.

Recycler, mais pas que

Les taux de recyclage du plastique sont actuellement inférieurs à 10%, ce qui pose un problème majeur. La production mondiale de plastiques a considérablement augmenté au cours des dernières décennies et le marché mondial du plastique était évalué à environ 580 milliards de dollars en 2020. Dans le même temps, si rien ne change, le coût mondial de la gestion des déchets solides municipaux devrait passer de 38 milliards de dollars en 2019 à 61 milliards de dollars en 2040. De plus, les émissions de gaz à effet de serre associées à la production, à l’utilisation et à l’élimination des plastiques issus de combustibles fossiles devraient atteindre environ 2,1 gigatonnes d’équivalent dioxyde de carbone (Gt éqCO2) d’ici 2050, ce qui représente 19% du budget carbone mondial. Selon une autre méthode de calcul, les émissions de GES provenant des plastiques étaient d’environ 1,7 Gt éqCO2 en 2015 et devraient atteindre environ 6,5 Gt éqCO2 d’ici 2050, soit 15% du budget carbone mondial.

Le faible taux de recyclage des plastiques entraîne l’abandon de millions de tonnes de déchets plastiques dans l’environnement, souvent brûlés ou déversés dans les cours d’eau sur de longues distances. Rien qu’en ce qui concerne les déchets d’emballage non valorisés, cela représente une perte estimée entre 80 et 120 milliards de dollars. Les plastiques prétendument biodégradables posent également un problème, car ils peuvent prendre des années à se dégrader dans les océans et présenter les mêmes risques que les plastiques traditionnels pour les personnes, la biodiversité et les écosystèmes.

Pour réduire la pollution plastique dans les océans, il est nécessaire d’adopter des interventions synergiques à différents niveaux, tant en amont qu’en aval de la production et de l’utilisation du plastique. Ces interventions comprennent des politiques de circularité, la suppression progressive des produits et polymères inutiles et problématiques, l’utilisation d’instruments fiscaux tels que les taxes et les droits, la mise en place de systèmes de consignation, de responsabilité élargie du producteur et de permis négociables, la suppression des subventions néfastes, l’innovation en matière de chimie verte pour des alternatives plus sûres, les initiatives visant à changer les comportements des consommateurs, et la promotion de l’écoconception et de modèles de services favorisant la réutilisation des produits.

Des progrès sont réalisés à tous les niveaux, et la possibilité d’un instrument mondial se dessine. Des actions sont menées au niveau mondial, régional et national pour lutter contre les déchets marins et la pollution plastique. De nombreuses municipalités et grandes entreprises réduisent les déchets envoyés en décharge, et des réglementations plus strictes sont mises en place en réponse à la pression croissante de l’opinion publique. L’activisme local et les actions des autorités locales, telles que la collecte des déchets, le recyclage des plastiques et les opérations de nettoyage communautaires, sont également en augmentation. Cependant, il existe encore une grande diversité de pratiques et de réglementations nationales.

Il existe déjà plusieurs engagements internationaux visant à réduire les déchets marins et la pollution plastique, notamment ceux provenant des sources terrestres. Des accords internationaux et des instruments juridiques non contraignants sont en place pour réglementer le commerce des matières plastiques et réduire leur impact sur la vie marine. Cependant, aucun de ces accords ne comporte d’objectif mondial contraignant, spécifique et mesurable pour la réduction de la pollution plastique.

C’est pourquoi plusieurs gouvernements, entreprises et organisations de la société civile réclament la mise en place d’un instrument mondial sur les déchets marins et la pollution plastique. Au mois de mai 2023, une session de 5 jours de négociations a commencé à Paris dans le but de progresser vers un traité visant à mettre fin à la pollution plastique. Les représentants de 175 nations se sont réunis au siège de l’UNESCO pour la deuxième session du comité international de négociation pour parvenir à un accord couvrant l’ensemble de l’utilisation et du recyclage des plastiques. L’objectif: mettre fin à la pollution plastique d’ici 2040. A voir…

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