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Et on reparle du Mercosur, un projet qui n’a rien d’écologique

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La naissance de l’idée d’un marché commun en Amérique latine remonte au traité d’Asunción, signé le 26 mars 1991.

Autour de la table se trouvaient l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay. Ce traité est entré en vigueur le 31 décembre 1994. En 2006, le Venezuela est devenu le cinquième membre permanent du Mercosur, mais il a été suspendu en 2017. La décision de suspendre le Venezuela a été prise en raison du fait que les autorités de Caracas n’alignaient pas leur législation sur la charte du marché commun sud-américain. Le Mercosur compte également des pays membres associés tels que la Bolivie, le Chili, la Colombie, l’Équateur, le Guyana, le Pérou et enfin le Suriname.

Le Mercosur, c’est quoi ?

Le Mercosur couvre une superficie de plus de 14 millions de km² et rassemble près de 300 millions d’habitants, représentant plus de 80 % du PIB total de l’Amérique du Sud. Il est considéré comme le troisième bloc économique en importance après l’Union européenne et l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (CUSMA).

Le Mercosur, connu en espagnol sous le nom de Mercado Común del Sur (Marché commun du Sud), est une alliance économique regroupant plusieurs pays d’Amérique du Sud. Il s’agit d’une zone de libre-échange qui vise à éliminer toutes les barrières tarifaires dans les échanges commerciaux entre les pays membres. Le Mercosur vise également à promouvoir l’intégration régionale en mettant en place une politique commerciale commune, une coordination des politiques macroéconomiques et une harmonisation des législations.

Les objectifs principaux de ce grand marché d’Amérique du Sud peuvent être résumés ainsi :

  • Établir un marché commun : le Mercosur vise à créer un marché intégré en éliminant les obstacles tarifaires et non tarifaires au commerce entre les pays membres. Cela inclut la réduction des droits de douane et l’harmonisation des réglementations commerciales.
  • Promouvoir la libre circulation des biens, des services et des facteurs de production : ce dispositif cherche à faciliter la libre circulation des marchandises, des services, des capitaux et des personnes entre les pays membres.
  • Coordonner les politiques économiques : les pays membres du Mercosur cherchent à coordonner leurs politiques économiques pour renforcer leur compétitivité et promouvoir le développement économique de la région.
  • Renforcer la coopération régionale : le Mercosur encourage la coopération entre les pays membres dans des domaines tels que l’éducation, la santé, l’environnement et la sécurité.

Autrement dit, autant d’objectifs louables, comme ceux fixés par l’UE sur le territoire européen. Là où le bât blesse, c’est lorsqu’on envisage des accords de libre échange entre l’UE et le Mercosur au moment même où l’on est en train d’expliquer à la population qu’il faudrait limiter les déplacements afin de réduire les émissions de GES, les pollutions diverses et variées et qu’il faut mettre l’accent sur la qualité plutôt que la quantité !

Les dangers d’un tel accord

Cet accord, comme le CETA (acronyme de Comprehensive Economic and Trade Agreement, c’est un accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Canada. Il est entré en application provisoire en septembre 2017, après avoir été ratifié par les institutions européennes et les États membres de l’UE), est un parfait exemple de ce que peuvent être des discours et injonctions contradictoires. Alors que l’on demande de relocaliser des activités agricoles, pharmaceutiques, industrielles, à l’heure où nous sommes censés réduire nos importations et exportations, au moment où le rôle des forêts primaires dans la lutte contre le changement climatique est prouvé, il est plus qu’inconvenant de relancer un tel dispositif.

Il existe en effet de nombreuses préoccupations environnementales liées à un éventuel traité Mercosur-UE.

Ainsi, les risques de déforestation seront inévitablement accrus, notamment en Amazonie, pour répondre à la demande croissante de produits agricoles, tels que le bœuf, le soja et l’huile de palme. La déforestation est également associée à la perte de biodiversité, à la libération de grandes quantités de gaz à effet de serre et à la destruction des habitats naturels. Nos dirigeants pleurent à chaudes larmes lorsque le Brésil brûle depuis 2020 notamment mais « inventent » un dispositif qui poussera les populations à brûler et déboiser toujours plus en encourageant l’expansion de l’agriculture intensive et de l’élevage ! Incohérence totale.

La production et le transport de ces produits contribuent aux émissions de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre, aggravant ainsi le changement climatique. L’expansion de ces industries dans le cadre d’accords commerciaux du Mercosur entraînera, c’est certain, une augmentation des émissions, contrecarrant ainsi les efforts de réduction des gaz à effet de serre.

En ce qui concerne la santé, il existe des inquiétudes certaines (et même plus que des inquiétudes) concernant les normes de sécurité alimentaire et les pratiques agricoles moins strictes dans certains pays du Mercosur par rapport à l’UE. L’importation de produits alimentaires provenant de ces pays entraînera inévitablement une exposition accrue à des substances potentiellement nocives pour la santé, telles que les pesticides et les hormones de croissance. Encore une fois, demander aux populations européennes d’être exigeantes sur la qualité de leur alimentation, de favoriser le local et revenir avec un traité qui aboutira, quoi qu’ils en disent, sur l’introduction sur le territoire européen de produits de qualité moindre !

En ce qui concerne l’emploi, les secteurs agricoles européens craignent une concurrence accrue des produits moins chers provenant du Mercosur, ce qui pourrait avoir un impact sur l’emploi local. Avec des normes sociales et environnementales moins strictes dans certains pays du Mercosur, on assistera à un dumping social et environnemental, créant ainsi des déséquilibres sur le marché. Les plus gros récupéreront les parts de marché des plus petits qui ne tiendront pas le choc et augmenteront leurs exportations vers ces pays du Sud au mépris de toutes les injonctions environnementales ! Bref…

D’un point de vue environnemental, c’est la catastrophe aussi malgré ce que peuvent en dire certains acteurs bien intéressés. Les accords commerciaux du Mercosur, jusqu’à présent, n’ont pas intégré de mesures environnementales suffisamment contraignantes pour lutter contre le changement climatique. Cela signifie que les pays membres ne sont pas tenus de respecter des normes environnementales strictes dans le cadre de leurs activités économiques, ce qui limite la capacité de ces accords à promouvoir une transition vers une économie bas-carbone et durable. À titre d’exemple, on peut dire que 30 % des pesticides utilisés au Brésil sont interdits sur le sol européen. Tout est dit.

Ce traité du Mercosur peut donc valablement être considéré par certains comme antinomique de la lutte contre le changement climatique en raison de la déforestation, des émissions de gaz à effet de serre associées à l’agriculture intensive, et du manque de mesures environnementales contraignantes.

Mercosur, le retour ?

Le Covid avait ralenti considérablement les négociations. L’urgence climatique avait aussi convaincu un certain nombre de dirigeants de mettre ces négociations en arrière-plan. Et voilà qu’en ce mois de juin 2023, la présidente de la Commission européenne effectue un voyage en Amérique du Sud dont l’objectif est de promouvoir l’accord commercial entre l’Union européenne (UE) et le Mercosur, qui est actuellement en attente de ratification.

Allez, d’un côté on dit aux populations européennes qu’il va falloir rentrer dans un système contraignant permettant d’aller vers « L’ajustement Objectif 55 » et de l’autre on va développer des échanges avec des pays situés à plusieurs milliers de kilomètres et ayant des normes environnementales bien moins élevées que les nôtres. Les citoyens et agriculteurs n’y comprennent vraiment plus rien. Enfin, pour être honnête, on n’en parle pas tant que cela. Le projet d’ajustement est en préparation et commence petit à petit à s’appliquer mais nos politiques se gardent bien d’en parler pour éviter de mettre le feu aux poudres. Concernant le Mercosur, le silence est de mise en France et ce sujet n’est que peu évoqué. On verra comment se comporteront nos dirigeants lorsqu’il s’agira de voter.

En effet, en ce qui concerne la position de la France, il est important de noter qu’elle entretient des relations économiques et politiques avec les pays membres du Mercosur en tant que membre de l’Union européenne. Dans le passé, la France a pourtant exprimé des préoccupations concernant certains aspects du Mercosur, notamment en ce qui concerne les normes environnementales et agricoles. Certains acteurs français, en particulier dans le secteur agricole, ont critiqué l’accord commercial entre l’Union européenne et le Mercosur en raison de nombreuses craintes liées à la concurrence dans le secteur agricole, notamment en ce qui concerne la production de viande bovine.

En 2019, la présidence française avait refusé de valider le traité « en l’état ». Ce genre de déclaration n’engage à rien puisqu’il suffit de changer une virgule et « l’état » n’est plus. Était-ce un coup politique ? La présidence du Brésil de l’époque étant peu respectueuse du président français et montrait avec désinvolture son mépris pour le respect de l’environnement. Il aurait été difficile à l’époque d’aller dans le sens du président brésilien, c’est une évidence.

Ou était-ce une réelle conviction que ce traité était néfaste pour la France, pour l’UE et pour la planète d’une manière générale ? Les semaines à venir apporteront, c’est certain, des réponses à ces interrogations. Depuis 4 ans, l’urgence climatique est de plus en plus visible, les sécheresses s’enchaînent, l’état des ressources en eau devient plus que préoccupant, les émissions de GES ne baissent que trop peu… En début d’année, le Président de la République a réitéré son refus de ratifier l’accord tel qu’il est actuellement formulé, à moins qu’il ne garantisse pleinement le respect de l’accord de Paris ainsi que des normes environnementales et sanitaires imposées aux producteurs européens. Rien n’ayant changé du côté Mercosur, il n’y a aucune raison que cette position soit amenée à changer.

Un point positif, une résolution de l’Assemblée Nationale de la France exhorte le gouvernement à informer les autorités de Bruxelles de son opposition à l’accord, à moins qu’il ne soit assorti de conditions garantissant le respect des normes de production européennes. De plus, elle demande l’inclusion de clauses suspendant l’accord en cas de non-respect des accords de Paris. On verra bien aussi jusqu’où les députés de la majorité sont prêts à être en pleine cohérence avec cette déclaration. Plus qu’à attendre.

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